Sous l’impulsion du législateur mais aussi pour des questions d’efficience, le secteur associatif connaît actuellement un important phénomène de regroupement sous la forme de fusion notamment. Xavier ROUSSINET (Directeur associé OPUS 3) et Colas AMBLARD (Avocat associé NPS CONSULTING), deux spécialistes de ce type d’opérations vous détaillent le mode opératoire et les étapes à respecter pour une restructuration associative réussie.
1/ Rapprochement entre associations : la nécessité d’une démarche introspective préalable
A l’initiative des associations, elles-mêmes mais également sous la pression plus ou moins bienveillante de leurs tutelles ou financeurs publics, les démarches de rapprochement se multiplient.
Les impératifs de gestion, la recherche d’une taille critique – plus ou moins idéalisée – , le besoin de davantage peser sur leurs parties prenantes sont autant de motifs qui guident ces opérations du point de vue associatif.
Avec les tensions importantes sur les finances publiques, dont les conséquences sont d’ores et déjà largement visibles sur les budgets associatifs, et la mise en œuvre progressive de la Loi NOTRe qui modifie considérablement le périmètre de compétences des collectivités territoriales et, partant, leurs priorités d’action, ces démarches de rapprochement vont vraisemblablement s’amplifier au cours des prochaines années.
Au-delà des aspects juridiques inhérents à de telles démarches et qui conviennent d’être abordées avec le plus grand sérieux et professionnalisme, une démarche de fusion ne peut être réussie dans le temps, que si elle parvient à refonder un projet global et cohérent et pas seulement à additionner les caractéristiques actuelles des associations concernées.
Dit autrement, sans mise en mouvement des acteurs et des projets, il y a tout lieu de penser que l’addition des projets associatifs préexistants fasse in fine moins que la somme des parties et que l’ensemble des protagonistes (bénéficiaires, salariés, bénévoles, financeurs, territoire…) se découvrent perdants à l’issue d’une opération dont ils attendaient pourtant des plus-values, voire, dans certains cas, des miracles.
Dans cette perspective, quatre principaux sujets doivent être progressivement et systématiquement abordés et documentés pour être en mesure de définir un projet renouvelé, ambitieux mais réaliste et surtout, répondant au mieux aux attentes et besoins des différentes parties prenantes et pas seulement aux impératifs budgétaires :
- Le projet associatif dans son ensemble et sa déclinaison en offre(s) de service ;
- Les ressources humaines, y compris bénévoles, et leur organisation ;
- Les éléments budgétaires et patrimoniaux et, plus largement, le modèle économique de la future entité issue de la fusion ;
- La gouvernance.
Si les puristes diront – à juste titre sans doute dans un contexte et un environnement stables – que ces sujets doivent être abordés de manière logique, c’est-à-dire en allant du projet stratégique à la définition des moyens d’action, l’essentiel est surtout de faire dialoguer entre elles les différentes composantes du projet associatif renouvelé que la fusion va permettre de mettre en œuvre.
Dans cette perspective, l’expérience montre que l’entrée par le modèle économique peut être au moins aussi intéressante que l’entrée par le projet.
D’une part, parce que dans de très nombreuses opérations de fusion, les aspects économiques sont au cœur de la démarche, qu’ils en soient la cause et/ou en constituent un des objectifs de sortie et qu’en faire en conséquence un point d’entrée de la réflexion peut permettre d’aller plus vite à l’essentiel pour ensuite mieux le mettre en perspective.
D’autre part, parce que l’approche par les valeurs – essentielle par ailleurs – est à l’usage une voie dans laquelle il est facile de se perdre ou de créer des hiérarchies morales peu utiles à l’action.
Dans ce contexte d’ensemble, interroger les modèles économiques dans la perspective de les faire évoluer dans la nouvelle entité issue de la fusion, c’est se donner l’occasion de réinterroger et de mieux articuler le lien entre le rôle social ou sociétal que l’association se donne, les missions et activités qui le concrétisent au quotidien et les ressources avec lesquelles elle agit.
2/ Rapprochement entre associations : une opération complexe basée sur l’anticipation
La fusion entre associations n’est pas une opération courante. Elle doit être réfléchie en amont (a), comme cela vient d’être dit, mais également planifiée (b), et optimisée tant sur le plan juridique et fiscal (c).
a/ Une opération réfléchie en amont
Parce qu’au-delà des aspects purement techniques, il s’agit pour les deux structures de s’accorder sur le plan des valeurs partagées, de la concordance du projet associatif et des moyens à mettre en œuvre. La gouvernance devra être partagée et le modèle économique de la structure absorbante pensé dans le but de pérenniser dans le temps l’action conjointe des parties à la fusion.
b/ Une opération planifiée
Parce que dans un premier temps, il conviendra de définir la nature de la fusion (fusion absorption ou fusion création) ainsi que le sens de la fusion en cas de fusion absorption. Et, dans un second temps, pour tenir compte des nouvelles contraintes imposées par le législateur en matière de fusion entre associations. Pour cela, il conviendra de déterminer précisément un calendrier des opérations à venir en tenant compte de la date de clôture des comptes et des différentes étapes obligatoirement imposées par le législateur. En effet, la loi n°2014-856 du 31 juillet 2014 ainsi que ses décrets d’application n°2015-832 du 7 juillet 2015 et n°2015-1017 du 18 août 2015 déterminent désormais un cadre précis pour la réalisation d’une telle opération, intégrant trois étapes obligatoires avant le tenue des assemblées générales extraordinaires appelées à délibérer sur l’opération de rapprochement .
Pour voir le calendrier des opérations : cliquez ici
c/ Une opération optimisée sur le plan juridique et fiscal
Car il s’agit d’éviter que les actifs transférés fassent immédiatement l’objet d’une taxation à l’impôt sur les sociétés en application des instructions fiscales du 13 juin 2014.
Pour cela, il conviendra de :
- connaître en amont le statut fiscal des associations participantes au projet de rapprochement, car le régime fiscal de l’opération en dépend en application des instructions fiscales du 13 juin 2014 ;
- sécuriser le régime fiscal de la structure absorbante, notamment lorsqu’il existera dans chaque association absorbée un poste « activités lucratives accessoires» qui, en raison de la fusion, risquerait d’exposer l’association absorbante au risque de franchissement du seuil de franchise commerciale (61.145 € pour 2016).
Ainsi, on le voit, les opérations de rapprochement entre associations ne sont pas à prendre à la légère. Elles requièrent un vrai savoir faire et commandent de recourir à des spécialistes rompus à ce genre d’exercice.
Xavier ROUSSINET , Directeur associé OPUS 3
Colas AMBLARD , Avocat associé NPS CONSULTING
Pour plus d’informations, NPS Consulting vous donne rendez-vous au Forum national des associations le 19 octobre 2016 à l’atelier A11 de 11h15 à 11h45.
En savoir plus :
Pour s’inscrire à l’Atelier A11 animée par Xavier ROUSSINET et Colas AMBLARD : cliquez ici
Formation Atelier-Débat ISBL CONSULTANTS animée par Colas AMBLARD le lundi 17 octobre 2016 à PARIS : Restructuration et rapprochement des associations (aspects juridiques et fiscaux) : cliquez ici